La révolte gronde dans les discothèques

Visuel de la compagne de pétition contre la société de recouvrement des droits d'auteurs la GEMA. "Nous sommes peut-être différents mais une chose nous unit : l'amour de la musique. Protégez ce que vous aimez. Stoppez les tarifs 2013 de la GEMA".

Dans un peu plus de 150 soirées, des lumières habituellement allumées vont peut-être s’éteindre dans les nuits des grandes villes allemandes et particulièrement à Berlin. Des boîtes de nuit menacent de fermer dont la plus célèbre d’entre elles, le Berghain.

En cause la nouvelle tarification mise en place par la GEMA qui devrait être effective le 1er janvier 2013. La GEMA est un peu l’équivalent allemand de la SACEM. En fait, pour être précis, en France, la Sacem perçoit pour le compte de la SPRÉ (Société pour la Perception de la Rémunération Équitable) la rémunération dans les lieux sonorisés (cafés, restaurants, commerces, parkings, etc.)

GEMA.  Le déroulé du sigle est cocasse et révélateur : Gesellschaft für musikalische Aufführungs- und mechanische Vervielfältigungsrechte = Société pour le recouvrement des droits des spectacles musicaux et des reproductions mécaniques. Comme leur nom l’indique, ils en sont restés à la reproduction mécanique, c’est d’ailleurs bien ce qu’on leur reproche : avoir de vieilles conceptions, de faire comme si l’on en était encore à poser un vinyle après l’autre sur une platine, l’activité de DJ n’étant pas par ailleurs prise en compte comme une activité créatrice.

LA GEMA se charge de taxer les différents événements dans lesquels intervient de la musique pour en reverser une part aux auteurs et – on l’oublie trop souvent – aux producteurs. En apparence, une activité tout à fait louable. D’ailleurs jusque là, tout le monde s’en acquittait même si ce n’était pas forcément avec le sourire.

Or, les choses se sont considérablement dégradées depuis que la GEMA a annoncé ces nouveaux tarifs. Contrairement à ce qui est répercuté par la presse française, il ne s’agit pas d’un prélèvement de 10 % sur les recettes. Le nouveau système de calcul « simplifié » prend en compte désormais la taille de la salle – de mur à mur, et non les dimensions de la piste de danse -, la durée d’ouverture – une nouveauté – et  les tarifs d’entrée. L’ancien système des forfaits est aboli.

Après avoir un temps été dupes, les propriétaires de discothèques mais aussi les restaurateurs ont actionnés leur calculettes pour constater que certaines augmentations iront de + 400 à  +1400%. Quelques exemples concrets :
Une boîte de 200 m² avec une entrée à 6€: en moyenne  +400% ;
Une boîte de 500 m² avec une entrée à 15€: en moyenne +1400% ;
Un événement gratuit de 20H à 2H du mat’ avec une prestation musicale faite par ordinateur dans un lieu ayant une surface de 133 à 200 m² voit ses taxes passer de 50,54€ nets à 80,96€ nets (+60%)
Un événement de 20h à 2h du matin  avec des prestations live et une entrée à 15€ dans un lieu ayant une surface de 133 à 200m² voit ses taxes passer de 164,80€ nets à 360€ nets (+118%).
Depuis, la révolte gronde dans les discothèques.
Les collectivités locales se réveillent et se demandent ce que cela signifie pour elles. A quelle superficie s’appliquera la taxation ? A l’ensemble de la ville ?  Voilà où mènent les « simplifications » quand elles sont le fait de bureaucraties.

L’intitulé de la pétition de protestation était tout trouvé : la GEMA a perdu le sens de la mesure. Elle a recueilli à ce jour  un peu plus de 246 000 signatures

Une première manifestation a eu lieu fin juin. L’association des propriétaires de discothèques cherche la négociation et menace d’un dépôt de plainte. D’autres conflits dégradent l’image de la GEMA, le blocage des vidéos sur Youtube, l’absence de transparence dans la gestion des répartitions, le fait que la société de recouvrement n’admet pas la création anonyme sous licence creative commons.

Sur toutes ces questions, la GEMA se comporte semble-t-il avec l’arrogance d’un monopole qui pourrait bien finir par être remis en cause y compris par Bruxelles.

Ajoutons pour finir qu’on pourrait dire que si elle voulait alimenter le succès du Parti pirate, la GEMA ne s’y prendrait pas autrement.

Voir sur le même sujet : Kulturkampf numérique

P.S. Sur l’actualité de la musique électronique à Berlin, je signale le site du DJ français Zaath Berlin-Techno

 

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Une réponse à La révolte gronde dans les discothèques

  1. Bernard UMBRECHT dit :

    L’article est cité dans un papier de Rue89 Strasbourg consacré à l’attrait des discothèques allemandes pour les Strasbourgeois.

    http://www.rue89strasbourg.com/index.php/2012/11/02/societe/discotheques-le-samedi-soir-a-strasbourg-se-passe-en-allemagne/

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