Mystérieux pirates

Après la première victoire à Berlin, 8,9 % des suffrages, 15 sièges sur 152, un score qui a surpris tout le monde, à commencer par les principaux intéressés, on avait voulu se rassurer en mettant cela sur le compte de l’esprit libertaire des Berlinois. Après leur abordage dans le Land de Sarre, 7,40 % et 4 élus, il faut se rendre à l’évidence : quand un parti nouveau prend la place d’un autre (le parti libéral, FDP) qui plus est un parti de la coalition gouvernementale, dont un membre est vice-chancelier, ça fait des vagues, il se passe quelque chose de sérieux. La rapidité du succès des Pirates, ils ont été créés en 2006, installe une nouvelle donne. Depuis, tout ce que l’Allemagne compte de commentateurs et d’experts en politologie se mobilise pour localiser le vaisseau pirate dans la galaxie des partis.
Exercice difficile car ils sont quelque part ailleurs que sur l’échiquier traditionnelle.
L’essai de localisation que vous voyez ci-dessus provient d’une tentative pirate elle-même. La carte est extraite d’un wiki pirate. En jaune, le parti libéral, FDP, en voie de disparition, en noir et bleu les Chrétiens démocrates, les Verts en vert, la Sociale-démocratie et die Linke en rouge. Dans la portion bordée par les vecteurs progressisme et libertarisme, on trouve, tout seul, le parti pirate. Le diagramme est construit sur une triple opposition : individualisme / collectivisme, conservateurs/ progressistes, restrictif / libertaire. Mais, en fait, les pirates sont un peu tout cela à la fois, et cette classification ne fonctionne pas vraiment.
Ils sont le parti du numérique et des réseaux, le « parti de la société de l’information », un mouvement en devenir, là où les autres sont des partis établis issus du capitalisme industriel et consumériste. Pour Marina Weisband, encore un peu secrétaire générale du Parti Pirate – elle quitte bientôt sa fonction pour pouvoir finir ses études – les pirates sont « l’antithèse du système Merkel », au sens où la chancelière a tendance à gouverner par-dessus le Parlement, pas du tout dans l’esprit d’une démocratie participative. Marina Weisband définit son parti plutôt comme un mouvement et comme le seul « libéral et social » : « nous avons des partis sociaux comme le Verts et le SPD qui sont classiquement sociaux mais non libéraux car ils prétendent qu’il y a une bonne et une mauvaise façon de vivre. Il y a ensuite le FDP, parti libéral sur le plan économique qui dit : liberté pour tous, que le plus fort gagne. Notre attitude est nouvelle : nous réclamons la liberté mais nous admettons que nous devons rendre cette liberté possible à tous ». Il faut prendre acte de la fin d’un système d’information unidirectionnel. : « ma génération a grandi avec la capacité de renvoyer de l’information. Nous pouvons commenter chaque article de journal, nous pouvons rédiger des blogs, nous pouvons générer des contenus. Et on se demande évidemment pourquoi ce ne serait pas possible aussi dans le domaine politique ».
En effet, on ne voit pas pourquoi. D’autant que les instruments existent désormais.
Prochaines échéances : au Schleswig-Holstein, le 6. Mai et en Rhénanie-Du-Nord-Westphalie, le 13. Mai.

 

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