Ophélie-Electre

La “femme sans visage” du Sofitel de New-York, dont on ne connaît que la silhouette enveloppée dans une couverture blanche tel un fantôme, comme l’écrit Le Monde du 20 mai 2011, s’était choisi, dit-on, le pseudonyme d’Ophélia. Cela m’a tout de suite fait penser à une autre Ophélie. Non pas celle de Rimbaud ou de Shakespeare mais celle qui prête sa voix à Electre, celle de Heiner Müller telle qu’elle apparaît dans le cinquième et ultime épisode de Hamlet-machine (Editions de minuit)

OPHÉLIE
(pendant que deux hommes en blouses de médecin enroulent autour d’elle et du fauteuil roulant des bandelettes de gaze de bas en haut)
C’est Electre qui parle. Au cœur de l’obscurité. Sous le soleil de la torture. Aux métropoles du monde. Au nom des victimes. Je rejette toute la semence que j’ai reçue. Je change le lait de mes seins en poison mortel. Je reprends le monde auquel j’ai donné naissance. J’étouffe entre mes cuisses le monde auquel j’ai donné naissance. Je l’ensevelis dans ma honte. A bas le bonheur de la soumission. Vive la haine, le mépris, le soulèvement, la mort. Quand elle traversera vos chambres à coucher avec des couteaux de boucher, vous saurez la vérité.
(Les hommes sortent. Ophélie reste sur la scène, immobile dans cet emballage blanc.)

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