Le mot impropre de l’année 2013 : « Sozialtourismus » (« tourisme social »)

La linguiste  Nina Janisch, porte parole du jury lors de la conférence de presse. Photo Patrick Bal

La linguiste Nina Janisch, porte parole du jury, lors de la conférence de presse. Photo Patrick Bal

Il existe depuis une vingtaine d’années, une association citoyenne et participative qui jette un regard critique sur des usages impropres du vocabulaire et veille à préserver la sensibilité à l’importance du choix des mots. C’est l’action « Unwort des Jahres » littéralement « le non-mot de l’année ». Le résultat est toujours intéressant même si c’est en négatif car cela témoigne du climat idéologique et de ses dérives dans la société allemande où tout va toujours si bien à ce que l’on nous dit.

L’association a rendu public son choix pour 2013, il y a quelques semaines, à la mi-janvier.

Après Döner-Morde (Meurtres Döner), en 2011, et Opfer-Abo (abonnement au statut de victime), celui de 2013 est plus facile à traduire, cette fois : Sozialtourismus, tourisme social.

Voici la justification du jury :

« L’année dernière [en 2013] la discussion sur l’immigration choisie et non choisie en Allemagne a été réactualisée. Dans ce contexte, certains hommes politiques et médias se sont servis de l’expression tourisme social pour faire de la propagande contre des migrants indésirables en provenance d’Europe de l’Est. Dans le mot composé Sozialtourismus (Tourisme social), le déterminé Tourismus (tourisme) suggère, en tordant le coup aux évidences, un voyage destiné au plaisir et à la détente. Le déterminant sozial (social) réduit l’immigration visée à l’objectif de profiter du système social allemand. C’est une discrimination envers des personnes qui par pure nécessité cherchent en Allemagne un meilleur avenir ; elle travestit leur droit de principe à le faire.
L’expression tourisme social s’inscrit dans une série d’autres mots à proscrire qui, ensemble, servent à attiser cette propagande : immigration de la misère (Armutszuwanderung). Utilisée dans le sens d’une immigration dans le système social, cette expression à l’origine diffamante est de plus en plus utilisée de manière indifférenciée comme une expression prétendument concrète et neutre. Avec la notion d’abus de liberté de circulation (Freizügigkeitsmissbrauch) on prête un comportement criminel à ceux qui usent de la liberté de circulation garantie au sein de l’Union européenne aussi maintenant à ceux qui viennent de Bulgarie ou de Roumanie. L’expression tourisme social pousse à l’extrême la présupposition d’une intention mauvaise ».

Source en allemand

Le mot de l’année est choisi, lui, par la « Gesellschaft für deutsche Sprache » ,GfdS, (Asssociation pour la défense de la langue allemande, l’équivalent de notre Association pour la défense de la langue française DLF). Elle agit selon des critères différents, fonction des occurrences d’un mot nouveau.
Pour l’année 2013, elle a opté pour le « mot », si on peur appeler cela ainsi, Groko.
Groko, abréviation de Grosse Koalition, désigne la grande coalition celle qui conduit les partis chrétien-démocrates (CDU et CSU) d’Angela Merkel à gouverner avec le parti social-démocrate (SPD)

Source en allemand 

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2 réponses à Le mot impropre de l’année 2013 : « Sozialtourismus » (« tourisme social »)

  1. Una dit :

    tordant le « cou », plutôt 😉

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