Restes incrustés

Billet invité

Venise 30 octobre 2006

C’est un terrible sentiment que de voir une ville mourir. Chaque jour quelque chose manque. Une fois, un marchand de légume, une autre, un cordonnier. Cette fois encore une librairie, en l’occurrence la Libreria Goldoni.

C’est la quatrième librairie qui ferme dans le quartier San Marco. La faute n’en revient pas seulement à la concurrence de l’Internet qui pousse à l’éviction, mais, avant tout, à Venise elle-même où, depuis 20 ans, est menée une politique dont l’objectif central est de vider la ville du dernier reste de vénitiens incrustés. Quand le loyer d’un magasin passe dans la nuit à 9000 euros, cela signifie que, le lendemain, on n’y vend plus de livre mais des manteaux Burberry, des sacs chinois ou de la quincaillerie à 1 euro. Des choses aussi exotiques que des marchands de légume, des bouchers ou des boulangers ont dépéri ici. Après tout, pourquoi pas, qui peut bien en avoir besoin s’il parcourt la ville, une bouteille d’eau minérale à la main.

C’est cela, m’a expliqué un jour l’ancien maire de Venise, l’économie de marché. Étonnante constatation de la part de quelqu’un qui a commencé sa carrière politique au Parti communiste.

Petra Reski

Traduit de l’allemand par Bernard Umbrecht avec l’aimable autorisation de l’auteure, journaliste et écrivain. Petra Reski écrit sur Venise et sur la mafia. Texte paru sur son blog, le 25 mars 2013.
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